Uzès, la cité ducale où l’Histoire s’invite à chaque ruelle

Tout commence bien avant la splendeur Renaissance. Fondée par les Volques Arécomiques, une tribu gauloise, Uzès trouve très tôt une place singulière dans la géographie du sud. Mais c’est surtout sous l’époque romaine que la ville s’impose : elle devient le point d’arrivée du fameux aqueduc de Nîmes, dont le célèbre Pont du Gard, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO (source : UNESCO), n’est que la partie la plus monumentale.

• La source de l’Eure, en bordure d’Uzès, fournissait l’eau précieuse de Nîmes sur près de 50 km. On peut suivre aujourd’hui une randonnée sur les traces de son tracé antique, l’un des ouvrages hydrauliques les plus ingénieux de l’Empire romain.
• À la fin du Moyen Âge, Uzès se dote d’un urbanisme singulier : on y trouve encore le plan “en fer à cheval” du centre, hérité du haut Moyen Âge et conservé presque intact à travers les siècles.

Rares sont les villes du Midi où l’on ressent cette continuité, de la ville antique à la “place aux herbes” médiévale, toujours cœur battant de la cité.

Lorsqu’on parle du “duc d’Uzès”, il ne s’agit pas qu’un simple titre : c’est le plus ancien duché de France, créé à la Renaissance par Charles IX en 1565. Le Duché incarne la prospérité, la puissance et la stabilité d’une région, ayant survécu à guerres de religion et bouleversements politiques.

• Le Château Ducal, toujours habité par la famille ducale — fait rare en France ! —, ouvre régulièrement ses portes aux visiteurs. Du donjon médiéval (11e siècle) à la façade Renaissance, l’ensemble est une chronique architecturale vivante.
• Un détail piquant : la famille ducale d’Uzès a occupé le rang de “premier pair de France”, juste après les princes du sang, un honneur unique qui faisait trembler la cour royale (source : Château Ducal d’Uzès).

Quand la grandeur se lit aussi dans la pierre

Il suffit de parcourir les venelles : tours massives, hôtels particuliers, remparts, chapelles séculaires, tous témoignent de l’influence politique et religieuse d’Uzès. La Tour Fenestrelle, campanile roman du 12e siècle, est LE symbole de la ville, et la seule tour fenêtre ronde de style lombard conservée en France.

Uzès fait office de microcosme religieux : siège d’un évêché pendant des siècles, la ville a vécu au rythme de conflits entre protestants et catholiques pendant les Guerres de Religion. De nombreux temples et églises, dont la Cathédrale Saint-Théodorit (avec la fameuse Tour Fenestrelle), témoignent de cette histoire mouvementée.

• Le quartier des Capucins rappelle la présence des ordres mendiants et l’effervescence spirituelle de la ville aux 16e-17e siècles.
• La cohabitation, souvent houleuse, entre communautés protestantes et catholiques, a laissé des traces dans la mémoire locale et dans la topographie des rues.

Les traditions religieuses croisent ici les legs culturels, de la fête de la Saint-Fiacre aux processions de la Semaine Sainte, qui attirent chaque année passionnés d’histoire, anthropologues et simples curieux.

Peu de places en France cristallisent autant l’histoire urbaine qu’Uzès. Autour des arcades de la Place aux Herbes, l’atmosphère méridionale est à son comble : marchés haut en couleur, effluves de lavande et de truffe, façades blondes ourlées de glycines.

1. C’est ici que s’installèrent les premiers commerçants, à partir du 12e siècle.
2. La place a longtemps rassemblé foires, audiences de justice et fêtes populaires.
3. Le marché d’Uzès, chaque mercredi et samedi, attire près de 10 000 visiteurs (source : Gard Tourisme), perpétuant une tradition vieille de plus de 900 ans.

Autour des puits, la mémoire des corporations d’autrefois affleure encore, conférant à la ville une atmosphère hors du temps, où le patrimoine immatériel rejoint la vie quotidienne.

Surprendre les férus d’histoire, c’est aussi dévoiler des pépites moins courues. Les anciennes chapelles rurales autour d’Uzès (chapelle Saint-Côme-et-Saint-Damien, église Saint-Étienne à Montaren…) offrent des exemples d’art roman régional où s’entrelacent histoire locale et paysages boisés.

• Les “bastides” des environs, goûteuses maisons-fortes aux accents toscans, racontent l’influence italienne sur l’architecture d’Uzès à partir du 15e siècle.
• Certains hameaux portent la trace de la révolte des Camisards (début du 18e siècle), épisode majeur de la résistance protestante dans le Languedoc (source : Musée du Désert, Mialet).

Explorer ces confins, c’est révéler une Histoire diffuse, inscrite dans la pierre et les campagnes, loin des sentiers touristiques traditionnels.

Pas une saison sans événement historique à Uzès ! En juin, les Médiévales font revivre banquets, joutes et défilés costumés. En hiver, la Truffe en fête rappelle l’importance du diamant noir dans l’économie locale depuis au moins le 18e siècle. Les musées d’Uzès, comme le Musée Georges Borias, sont autant d’écrins à anecdotes : pièces gallo-romaines, costumes d’époque, témoignages oraux de la vie d’antan.

• Chaque année, les Journées du Patrimoine (Ministère de la Culture) attirent des milliers de visiteurs, grâce à des parcours souvent inédits.
• On découvre alors des jardins secrets, des caves voûtées, ou les bastides attenantes à la ville fermées le reste du temps…

• Marie de Uzès, duchesse du 19ème siècle, fut la première femme en France à être verbalisée pour excès de vitesse… à cheval (source : Le Figaro Histoire).
• L’usine Haribo, créée en 1992, rappelle la tradition locale… de la réglisse ! Cultivée dans la région depuis l’Antiquité, elle fit la fortune de la ville à l’époque moderne.
• Le premier Duc d’Uzès, Antoine, fut l’un des chefs protestants les plus influents lors des guerres de religion, tentant sans relâche de préserver l’autonomie de sa ville face à la couronne et aux armées royales.
• On trouve dans les sous-sols de nombreuses maisons de la vieille ville d’anciens silos à grain gallo-romains, témoignant d’une activité agricole intense dès l’Antiquité.

• Préférez la basse saison (hiver ou début printemps) pour savourer le calme des ruelles médievales ; l’été, la ville fourmille mais dévoile tout son art de vivre et ses fêtes traditionnelles.
• Des visites guidées sur l’architecture médiévale ou l’histoire protestante sont proposées par l’Office de Tourisme : parfait pour entrer dans les coulisses du patrimoine.
• Osez les balades au lever du jour, quand Uzès s’éveille dans les effluves de café et d’herbes aromatiques, ou au crépuscule, quand les pierres blanches rosissent sous la lumière déclinante.
• Une pause au jardin de l’Eure offre un écrin de verdure où se mêlent vestiges romains et essences méditerranéennes.

Plus qu’une simple “étape”, Uzès invite à explorer, questionner, s’émouvoir. Sa capacité à conjuguer passé et présent, mémoire et vitalité, en fait une source inépuisable d’inspiration pour qui cherche à comprendre l’âme languedocienne, loin des sentiers battus. Découvrir Uzès, c’est toucher du doigt mille ans de luttes, de fêtes, de passions humaines gravées dans la pierre et les souvenirs, pour une immersion sensorielle et historique que peu de villes peuvent offrir en Occitanie.

Bibliographie & sources :

• UNESCO, Pont du Gard : lien
• Château Ducal d’Uzès : histoire
• Ministère de la Culture : Journées du Patrimoine
• Gard Tourisme : informations
• Musée du Désert à Mialet
• Le Figaro Histoire