Plonger au cœur du vivant : les rencontres sauvages du parc de la Narbonnaise en Méditerranée

21 septembre 2025

Oiseaux remarquables : la parade aérienne des lagunes


Ici, le regard se lève vers le ciel et s’égare au fil de vols majestueux. Les lagunes de Bages-Sigean ou de la Palme, humides et salées, se muent en havres de paix pour les oiseaux migrateurs, qui font halte sur ces terres à la croisée des continents. Le Parc est inscrit au réseau Natura 2000 et à la convention de Ramsar, témoignant de son importance pour l’avifaune (Ramsar).

Parmi les espèces emblématiques observables :
  • Flamant rose (Phoenicopterus roseus) : Figure iconique des lagunes, le flamant rose ne passe jamais inaperçu avec son plumage élégant. La Narbonnaise accueille plusieurs centaines d’individus, venus s’alimenter de crustacés, notamment dans l’étang de Bages-Sigean. En automne, jusqu’à 20 000 oiseaux aquatiques sont recensés (LPO).
  • Avocette élégante (Recurvirostra avosetta) : Son long bec recourbé et sa démarche gracieuse rendent l’avocette facilement identifiable sur les vasières. Elle niche dans la région entre avril et juillet.
  • Tadorne de Belon (Tadorna tadorna) : Ce grand canard blanc et roux est présent toute l’année et se concentre surtout dans les zones de marais salants.
  • Echasses blanches (Himantopus himantopus) : Jambe en roseaux et silhouette élancée, elle affectionne particulièrement les salins de l’île Sainte-Lucie.
  • Hirondelle de rivage : Mention spéciale pour ce petit migrateur infatigable qui niche dans les falaises de la vallée de la Berre et le long de la mer.

Parmi les rapaces, on peut aussi apercevoir l’élégant faucon crécerellette, l’aigle de Bonelli (en difficulté en France) ou le busard des roseaux, dont la surveillance se révèle cruciale pour la conservation des milieux rares (Observatoire des oiseaux de la Narbonnaise).

Le monde secret de la garrigue : reptiles, amphibiens et insectes


La garrigue méditerranéenne, parfumée de thym et de lavande, abrite une faune discrète mais essentielle à l’équilibre des écosystèmes. Ici, les pierres chaudes, les clapas et les sentiers poussiéreux deviennent le théâtre d’une vie insoupçonnée :

  • Lézard ocellé (Timon lepidus) : Plus grand lézard d’Europe (jusqu’à 80 cm), sa livrée verte mouchetée d’ocelles bleues le rend unique. On le rencontre dans les zones rocailleuses et ouvertes, où il trouve abri et chaleur.
  • Tortue d’Hermann (Testudo hermanni) : Protégée en France, la tortue d’Hermann fait partie des reptiles les plus rares de la région. Elle affectionne les maquis et les garrigues sèches, mais reste très difficile à observer du fait de sa discrétion et de la pression humaine croissante (Herpétologie France).
  • Sauterelle œdipode turquoise : Ce petit orthoptère se caractérise par sa couleur turquoise éclatante sous les ailes, visible lors de l’envol.
  • Libellule sympétrum rouge sang : Présente autour des zones d’eau stagnante, cette libellule est l’un des plus beaux ambassadeurs de la biodiversité locale.
  • Pélobate cultripède : Un amphibien rare en France, que l’on rencontre encore dans quelques points d’eau temporaires des dunes et prairies humides.

Ce réseau vivant permet de maintenir une pollinisation efficace, de contrôler la population de ravageurs et de renforcer la résilience des milieux méditerranéens face aux changements climatiques.

Trésors des étangs et lagunes : poissons et amphibiens singuliers


Les étangs de la Narbonnaise, nourris par l’eau de mer et l’eau douce, constituent des réservoirs de biodiversité aquatique tout à fait singuliers en Occitanie. Ces milieux, oscillant entre eaux saumâtres et canaux, sont essentiels pour la reproduction de nombreuses espèces :

  • Anguille européenne (Anguilla anguilla) : Espèce migratrice, elle réalise le prodige de relier la Narbonnaise à la mer des Sargasses, au large des États-Unis, pour se reproduire.
  • Brochet : Bien qu’il soit plus typique des lacs et rivières d’eau douce, il survit dans les zones de transition des lagunes.
  • Gambusie : Petit poisson introduit au XX siècle pour la lutte contre les moustiques, il fait désormais partie intégrante de ces eaux.
  • Triton crêté : Une espèce d’amphibien rare, au dos orné d’un spectaculaire crête chez le mâle, observée dans certains marécages du parc (Faune Languedoc-Roussillon).

Les cigales, amphibiens et insectes aquatiques composent également un chœur discret mais essentiel à la santé de l’écosystème. La Narbonnaise est l’un des rares parcs naturels où la richesse des milieux aquatiques côtoie la garrigue, créant des points de rencontre pour une faune particulièrement variée.

Mammifères et autres Sabots de l’Ombre


Le spectacle dans la Narbonnaise se joue plus souvent à l’aube ou au crépuscule, lorsque l’œil attentif peut parfois surprendre :

  • Sanglier : Pénétrant les franges de la garrigue et les sous-bois, il façonne aussi le paysage par sa quête de nourriture et ses fouilles.
  • Loutre d’Europe (Lutra lutra) : Après avoir frôlé l’extinction via les pollutions et l’altération des milieux, la loutre est en retour discret depuis la fin des années 1990 dans la basse vallée de l’Aude.
  • Renard roux, chevreuils, blaireaux : acteurs discrets mais essentiels de la biodiversité locale, ces mammifères participent au fragile équilibre et à la dissémination des graines.

Moins connus mais tout aussi passionnants, les chiroptères (chauves-souris) trouvent dans les grottes, ponts et vieux arbres du parc des refuges prisés. On y a dénombré une dizaine d’espèces différentes, dont la noctule de Leisler et le rhinolophe, protégés par les directives européennes (Inventaire National du Patrimoine Naturel).

Un patrimoine végétal unique : flore méditerranéenne et espèces rares


Impossible d’évoquer la Narbonnaise sans la couronner de son manteau végétal. Plus de 2000 espèces de plantes y croissent, dont plusieurs se distinguent par leur capacité à survivre là où peu s’aventurent :

  • Sarcocorne : Plante halophyte (tolérante au sel), elle dessine de vastes tapis rouges et verts qui flamboyent à l’automne dans les salins.
  • Limonium narbonense : Endémique du littoral méditerranéen, aussi appelé statice de Narbonne, il fleurit délicatement dès le printemps sur les lagunes.
  • Ophrys : Orchidées sauvages à l’apparence d’insecte, une vingtaine d’espèces sont recensées sur le parc avec des floraisons souvent précoces.
  • Immortelle des dunes : Emblème odorant, elle tapisse les sables et résiste aux embruns, diffusant ses notes de curry sous le soleil d’été.

La richesse botanique de la Narbonnaise constitue un patrimoine vivant reconnu par la communauté scientifique : de nouvelles plantes sont encore décrites sur le territoire, témoin de sa diversité inexplorée (Tela Botanica).

Actions concrètes pour les espèces protégées : surveiller, restaurer, impliquer


La protection des oiseaux d’eau, des reptiles et mammifères s’inscrit dans une gestion attentive et adaptative. Diverses actions menées avec le soutien des associations locales ou nationales témoignent de cet engagement :

  • Suivi scientifique annuel : Par exemple, les colonies de flamants roses et d’avocettes sont suivies par la LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux) et le Parc pour recenser les effectifs, évaluer la reproduction et anticiper les menaces comme la baisse du niveau des lagunes ou la montée des eaux liée au climat.
  • Restauration des milieux : Réhabilitation des zones humides, préservation des clapas pour les reptiles, gestion de la végétation dans les marais… autant d’actions qui contribuent au maintien du fragile équilibre écologique.
  • Sensibilisation du public : Des panneaux, observatoires, sentiers thématiques (notamment autour de l’île Sainte-Lucie ou de Gruissan) offrent aux visiteurs des clés de lecture et facilitent la rencontre respectueuse avec la biodiversité.
  • Projets participatifs : Comptages, animations école-nature, suivi des libellules ou recensements floristiques sont régulièrement organisés avec la participation de bénévoles locaux.

À noter, la Narbonnaise fait partie du programme européen LIFE pour la restauration des milieux lagunaires et la protection d’espèces prioritaires (LIFE Programme).

Quelques conseils pour observer la faune sans la déranger


  • Préférez tôt le matin ou le crépuscule pour surprendre les espèces actives.
  • Privilégiez jumelles, longues-vues ou appareils photo avec zoom pour garder vos distances.
  • Restez sur les sentiers balisés, notamment dans les salins et roselières, pour ne pas piétiner des zones fragiles ni déranger les nids ou les jeunes animaux.
  • Renseignez-vous auprès des maisons de la Narbonnaise : des guides naturalistes proposent des sorties accompagnées pour maximiser les chances d’observations mémorables.

Une invitation à explorer, comprendre et préserver


Le Parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée est bien plus qu’un espace protégé : il incarne la générosité et la fragilité d’un monde subtilement équilibré, où chaque promenade peut se transformer en aventure sensorielle et scientifique. Du ballet tout en élégance des flamants aux secrets bien gardés des tortues ou au parfum résineux de la garrigue en plein été, chaque rencontre offre un instant rare et précieux.

Pour celles et ceux qui souhaitent aller plus loin, la Narbonnaise propose régulièrement des événements et ateliers de découverte, notamment lors des Journées européennes du patrimoine ou à la Fête de la nature. Parce qu’observer, c’est déjà apprendre à aimer et protéger – et parce qu’ici, la nature est aussi spectaculaire que vulnérable.

Sources : Parc naturel régional de la Narbonnaise, LPO, Ramsar, Observatoire des oiseaux de la Narbonnaise, INPN, HERPETOFAUNA, Tela Botanica, LIFE Programme, Faune-Languedoc-Roussillon.

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